Cette semaine, la paire GBP/USD a connu une importante correction à la hausse, suite à l'affaiblissement général du dollar américain. La livre s'est renforcée de près de 150 points, rebondissant depuis le plus bas prix de plusieurs semaines (1,3601). Mais pour l'instant, les acheteurs de cet instrument se sont calmés : l'impulsion à la hausse a disparu et la paire est restée bloquée dans une stagnation, ne cassant pas le niveau de résistance de 1,3750 (ligne Tenkan-sen sur le graphique journalier).
La correction à la hausse est uniquement due à la faiblesse du dollar américain, tandis que la livre sterling le suit docilement. Avant le symposium économique de Jackson Hole (ou, pour être plus précis, avant le discours de Jerome Powell à ce symposium), les traders se montrent réticents vis-à-vis de la devise américaine. L'indice du dollar a progressivement dégringolé pendant deux jours, mais il a repris ses esprits lors de la séance asiatique de mercredi, revenant dans la zone du 93e chiffre.
Dans le même temps, les participants au marché ne tiennent pas compte des statistiques macroéconomiques actuelles, ce qui est contradictoire. L'indice manufacturier Fed-Richmond, qui est basé sur une enquête auprès des entreprises manufacturières de cette région, a baissé assez fortement, pour finir à environ 9 points. Il s'agit du résultat le plus faible depuis juin de l'année dernière. À titre comparatif, l'indice a atteint 27 points le mois dernier, et à 26 points l'année précédente. Cette forte baisse est en cohérence avec la dynamique de l'indice d'activité dans le secteur manufacturier américain (Manufacturing PMI). Cet indicateur est également sorti de la «zone rouge» avant-hier, ralentissant sa croissance à 61,2 (la valeur précédente était de 63,4 points). Rappelons également l'indice du sentiment des consommateurs du mois d'août de l'Université du Michigan (qui s'est effondré à son plus bas niveau depuis 10 ans) et les dernières données sur les ventes au détail aux États-Unis, reflétant la baisse de l'activité de consommation des Américains. Parmi les dernières publications dans la «zone verte», seules les données du secteur immobilier ont été publiées. Le volume des ventes de logements sur le marché secondaire a augmenté de 2% en juillet, dépassant largement les valeurs prévues (+0,2%).
D'une part, les rapports macroéconomiques susmentionnés sont secondaires, alors que, par exemple, les dernières données sur les emplois non agricoles ont reflété la reprise du marché du travail américain. D'autre part, les publications dans la "zone rouge" augmentent la probabilité que Jerome Powell adopte une position prudente lors de son discours de vendredi et n'annonce pas une réduction précoce de l'assouplissement quantitatif (et de nombreux traders attendent cette mesure de sa part).
Robert Kaplan, collègue de Jerome Powell et directeur général de la Banque fédérale de réserve de Dallas, ne fait que renforcer les inquiétudes quant à la mise en œuvre de ce scénario. Au cours des semaines précédentes, il a exprimé des thèses "agressives", soutenant l'idée d'une normalisation de la politique monétaire. Il a également déclaré qu'il souhaitait que la Fed commence à réduire ses achats d'actifs en octobre. Mais vendredi dernier, Kaplan a changé de position, surprenant les traders par son attitude axée sur le compromis. Il s'est inquiété des conséquences négatives possibles de la propagation rapide du variant delta du coronavirus, ajoutant qu'il pourrait être amené à ajuster quelque peu ses vues sur la politique monétaire si le Covid-19 continue de progresser.
Compte tenu du fait que le coronavirus continue réellement à se propager, les propos de Kaplan ont constitué la base d'un pullback correctif de la paire GBP/USD. Mais ici, il est nécessaire de souligner que la correction de la paire est due uniquement à la faiblesse du dollar américain. Ce fait indique la précarité de la situation actuelle. Si Jerome Powell reconnaît les risques, mais maintient l'option de réduire l'assouplissement quantitatif, le billet vert se précipitera vers le haut sur tout le marché, et la paire GBP/USD ne fera pas exception. La livre ne pourra pas s'opposer au rallye du dollar, au milieu de la position indécise des représentants de la Banque d'Angleterre.
Pour en revenir aux propos de Robert Kaplan, il faut noter que son discours n'était pas aussi catégorique qu'il a été présenté par les médias. Préoccupé par la propagation d'un nouveau variant du coronavirus, il a noté que ce facteur n'a pas d'impact significatif sur l'activité des consommateurs jusqu'à présent, mais qu'il pourrait affecter la capacité à embaucher de nouveaux employés à l'avenir par crainte de l'infection.
Il convient également de noter que les États ne prévoient pas d'instaurer des confinements à l'instar de la Nouvelle-Zélande ou de l'Australie. Les représentants de la Maison Blanche ont clairement expliqué que la recrudescence des cas est causée par des citoyens non vaccinés, qui se mettent en danger et mettent en danger les autres. La grande majorité des hospitalisations et des décès concerne les patients qui n'ont pas été vaccinés. Washington n'a donc pas l'intention de revivre l'année 2020 : au lieu de geler l'économie, les autorités américaines exhortent la population à se faire vacciner le plus rapidement possible. Ce fait pourrait apaiser les inquiétudes concernant le «facteur coronavirus» de la part de la Fed, jouant en faveur d'une réduction précoce de l'assouplissement quantitatif. En outre, il ne faut pas oublier le procès-verbal «hawkish» de la dernière réunion de la Fed, qui a été publié la semaine dernière. Lors de la réunion de juillet, les membres du régulateur américain ont laissé la possibilité de réduire les incitations d'ici la fin de l'année.
Autrement dit, l'intrigue concernant le sort de la politique d'assouplissement quantitatif persiste, et cette situation rend les traders nerveux - tant les acheteurs que les vendeurs de GBP/USD. Les premières impressions négatives associées au discours de Robert Kaplan vendredi se sont dissipées - après tout, il n'a fait qu'exprimer son opinion, et ne reflète pas celle de Powell ou de la Réserve fédérale dans son ensemble. Cependant, Kaplan lui-même n'a pas encore rejoint les rangs de ceux à l'attitude conciliante, mais s'est seulement inquiété de la propagation du variant delta.
Tout ceci suggère qu'il est désormais préférable d'adopter une position attentiste pour la paire GBP/USD (ainsi que pour les autres paires de devises majeures), car la pression peut osciller aussi bien en faveur du dollar américain que contre lui.